Ce soir 31 janvier — Carnet de Mues, rythme soutenu, exigeant. La méthode du décalage entre écriture et mise en ligne n’a pas tout résolu, il aurait fallu décaler y compris les préparations. Les relectures sont lentes, les mises en lignes à soigner. Au fil du courant des petits ruisseaux du temps, je flotte et me laisse entraîner, mais cela suffira-t-il ? Carnet de Mues, suite baroque d’augmentations et de diminutions.
Là, il s’agit d’un travail d’appoint qui améliore l’ordinaire, un drôle de petit boulot, qui donne la possibilité de rencontrer des personnes pour un accompagnement et des conseils en rapport à leurs besoins de santé. Être présente pour elles et eux, échanger au cœur de leurs situations personnelles, entrer dans leur intimité. Chaque mot compte double.
Ce sont des femmes souvent, travaillant dans des écoles, des cantines, des crèches, en contrats précaires, conscientes et fatalistes devant les conditions qui leur sont faites. Elles connaissent les mécanismes qui les rabaissent : embauches au jour le jour, carrières tronquées, attributions de postes biaisées. Elles sont une force, elles sont indispensables, et elles pourraient faire pencher la balance en leur faveur, les combats passés des femmes des hôtels ne sont pas pour elles, elles sont à la Ville, l’employeur est diffus, elles sont dans des centaines de sites différents. Elles assument seules les CDD, les interruptions de contrats, les aléas auxquels elles sont soumises. Nos organisations injustes utilisent les failles d’un double jeu, soufflent un chaud-froid de salaires au rabais et de menace de débauche… Elles ne se plaignent pas, elles espèrent un contrat renouvelé, un CDI, et le Graal : la titularisation. Pendant nos rencontres, des connivences s’installent, un peu d’attention, d’empathie, une réponse précise, une explication pour décider et choisir. Elles disent Ça nous manque. On devient familières, on se remercie, on sourit, parfois on rigole à propos des trucs pas drôles, et l’énergie circule entre nous. Puis je les oublie — car il le faut. (À suivre)