Ce jour 14 février — Je reviens sur mon rapport à la régularité de l’écriture, et sur la régularité en générale. Il s’agit d’un obstacle contre lequel je butte et butte encore : ce qui mène à bien un projet, ce qui fait que la totalité du projet est accompli, et son corollaire : la désaffection. Au fil du temps j’ai mes techniques. Je feinte ! J’annonce une réalisation alors qu’elle n’est qu’en toute petite partie accomplie. Cela me tient, m’engage, surtout s’il y a en vue une apparition publique, une performance à dérouler, un texte à envoyer. C’est le sens de mon premier billet et l’engagement que j’y prends. C’est le sens de ce carnet qui débute au 25 janvier, date qui semble déjà lointaine. Je me sais tout à fait capable de totalement oublier mon intention, d’interrompre ma présence, de renoncer dans l’oubli à l’intention générale de Carnet de Mues, l’oubli de l’écriture régulière, l’oubli de la jubilation offert par le décalage écriture/mise en ligne.
On connaît mieux les effets de telles (dé)organisations et on tente de nommer le trouble : celui de l’hyperactivité, celui de l’attention, celui qui remplacent les mots péjoratifs. Étourdie par exemple. On sait aujourd’hui que les filles intègrent ces troubles de façon calme, par le retrait, et la rêverie, la déconnexion quand les garçons vont se comporter de manière plus brutale que la moyenne, être moins inhibés, plus désinvoltes.
Quand je découvre le ravissement, celui de Lol V. Stein de Marguerite Duras, je me dis qu’il y a de ça en moi, ce qui interrompt et coupe de l’entourage, ce qui plonge dans un état quasi cataleptique mais je n’en connais pas la cause. J’invente des rituels, des palliatifs : comment ne pas perdre quelque chose, comment rester focus, amoindrir les effets négatifs des décalages, des retards, des réponses inadéquates à des questions floues, l’ennui profond d’on ne sait quoi. L’étrangeté dont j’ai fait ma signature.(À suivre)