16 février 2025
#73 | chronique • tours et détours

De quoi est-il question dans les Petites histoires de Mues qui depuis octobre, animent le Carnet ? De ce que la mémoire fait aux choses passées, aux choses lointaines. Ces petites choses d’odeurs, de vues, de sons, de rythmes, de lumières, d’instants qui normalement s’effacent et désencombrent la mémoire, la machine de chair molle avec ses propres règles quand il s’agit d’oublier. 

Ou de faire autrement.

Non pas que j’aime ou cultive la différence. On aimerait tant ne pas dépasser de la ligne, se fondre dans le paysage.

La mémoire extensible, qui sent, qui convoque, qui classe jour après jour depuis toujours, produit en retour la sensation de déjà-vu, de déjà-entendu, elle construit de l’avance sur ce que l’autre — toi en face de moi — est en train de dire, et dans l’élan finit la phrase qui butte dans ta bouche. La mémoire toujours s’active ne supporte pas l’ennui, et elle s’ennuie à la vitesse de l’éclair — c’est un fonctionnement physiologique pas un trait de caractère — alors pour éviter l’ennui, le contrer, créer du neuf, elle est prompte et dévie inlassablement le risque en traitant de l’information, de l’action, inventant des rêveries, des tourbillons de choses indescriptibles en quelques mots.

Mais ce n’est pas tout.

Si depuis quatre paragraphes j’en suis à disséquer ma mémoire trop prolixe, j’avais l’idée de venir écrire aujourd’hui à propos des notes de lecture, et ce qu’elles font à l’écriture. Seulement ma mémoire est aussi capable d’oublier le geste ou l’intention. Il y a quinze jours, j’entamais d’écrire cette chronique Mémoire, pour faire série, pour continuer à penser les aides à l’écriture lancée lors de la chronique #70. Le thème me résiste et je ne trouve pas de conclusion, je le « mets en attente » et boucle en vitesse la micro fiction #71. La semaine dernière, toujours trop vite, je file au bout du document, je repars d’où j’en étais, après le livre qui compte ce sera l’amour ne tire pas les cheveux #72. Ce vendredi je parcours le document une nouvelle fois et… mes yeux repèrent enfin la chronique laissée en attente, coincée avec les textes terminés, je m’y plonge et dans le même instant, s’efface mon intention première — il me faut relire ce texte pour me la rappeler — d’écrire à propos du role et usage des notes de lectures où je voulais dire ma manière de les perdre et du besoin de les garder vivantes et ouvertes, et du choix d’être accompagnée pour apprendre à mieux le faire. 

Ici et maintenant, les choses de mémoires et de notes bouclent chacune leur spirale inversée.

écrire autrement avec Laura Vasquez

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